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Page:Thiers - Histoire de la Révolution française, tome 10.djvu/85

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directoire (1798).

Il était naturel que la France s’emparât des caisses appartenant aux anciens cantons aristocratiques, pour payer les frais de la guerre. L’argent contenu dans les caisses, et les approvisionnemens renfermés dans les magasins formés par les ci-devant cantons, lui étaient indispensables pour faire vivre son armée. C’était l’exercice le plus ordinaire du droit de conquête elle aurait pu sans doute renoncer à ce droit, mais la nécessité la forçait d’en user dans le moment. Rapinat eut donc ordre de mettre le scellé sur toutes les caisses. Beaucoup de Suisses, même parmi ceux qui avaient souhaité la révolution, trouvèrent fort mauvais qu’on s’emparât du pécule et des magasins des anciens gouvernemens. Les Suisses sont, comme tous les montagnards, sages et braves, mais d’une extrême avarice. Ils voulaient bien qu’on leur apportât la liberté, qu’on les débarrassât de leurs oligarques, mais ils ne voulaient pas faire les frais de la guerre. Tandis que la Hollande et l’Italie avaient souffert, presque sans se plaindre, le fardeau énorme des campagnes les plus longues et les plus dévastatrices, les patriotes suisses jetèrent les hauts cris pour quelques millions dont on s’empara. Le directoire helvétique fit de son côté apposer de nouveaux scellés sur ceux qui venaient d’être apposés par Rapinat, et protesta ainsi contre la mesure qui mettait les caisses à la disposition de la France.