Page:Vallat - Le Génie de Rabelais, 1880.djvu/28

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de lui répondre dans les règles : « Baudet, baudet, tu ne concluds point in modo et figura. Voyla de quoy seruent les suppositions et parua logicalia etc.[1] » L’air grave et solennel, avec lequel maître Janotus donne ainsi une de ses qualités à son confrère, est tout-à-fait plaisant.

Avec quelle verve Rabelais se rit des subtilités scolastiques, quand il parle du royaume d’Entéléchie[2] où domine la reine Quinte Essence, fille de Duns Scot[3], qui « à son disner rien ne mange, fors quelques Cathegories, Iecabotz (abstractions), Eminins (espèces), Dimions (apparences), Harhorins (pensées), Chelimins (songes), Secondes intentions, Caradoth (pensées embarrassantes[4]) » et autres fariboles du même goût. Il est aisé de comprendre que, pour arriver au palais d’une reine qui, d’après le régime de son père, fait des repas si substantiels, il faut aborder au port de Mateothecnie[5] où l’on rencontre les fervents adeptes capables de se consumer à distinguer l’essence elle-même de

  1. Gargantua. Chapitre XX.
  2. Mot créé par Aristote, désignant l’âme même considérée comme force première de transformation et de perfectionnement.
  3. Il imagina une cinquième essence ou principe du genre et de l’espèce.
  4. Pantagruel. Livre V, chapitre XIX.
  5. Vaine science.