Page:Visan - Paysages introspectifs, 1904.djvu/28

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la distance angulaire des deux astres. Le premier gagnait l’Orient, le second éclaira l’Occident. Il fut dès lors impossible au même spectateur de contenir en son œil l’écart de leur fuite contraire au ras de l’horizon. Les deux bataillons des sages suiveurs, sous la conduite de l’élue respective, se tournèrent le dos, et, ne pouvant plus s’apercevoir, ne croyant plus sympathiser en la recherche d’un seul idéal, s’oublièrent.

Or, pour qui aurait la force de percer, suivant un axe imaginaire, la croûte de la matière où s’embourbent nos pas, de contempler en son éternité le firmament de l’esprit, de se situer centre de la circonférence infinie, — pour celui-là le diamètre des deux étoiles apparaîtrait d’angle égal, et l’argent de leur même regard se refléterait en son œil. En sorte que pour graviter aux antipodes l’un de l’autre, le mage philosophe et le mage poète ne longent pas moins une seule et même route. Et peut-être verra-t-on la nuit d’aurore où les deux astres, ayant atteint l’un le zénith, l’autre le nadir du monde essentiel, déclineront de leur hauteur, se précipiteront à nouveau à leur rencontre, finiront par s’approcher au point de se boire, de fusionner encore dans le même éclat et de réunir les messagers sous la radieuse monade de leur rayon intégral.

Celui donc qui se hisserait par dessus les nuages jusqu’à l’empyrée de l’esprit, d’où la vue s’étend