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ÂME BLANCHE

dant, naguère, de ma séparation d’avec la malheureuse femme.

J’en voulais particulièrement à ma tante Josine qui, jamais, ne s’était cachée de ses sentiments d’antipathie envers elle et un invincible besoin de fuir la vieille fille, d’éviter sa présence et sa sollicitude me prenait. N’était-ce pas le rôle de ma mère qu’elle usurpait ainsi et lui devais-je aucune reconnaissance du bien qu’elle avait pu me faire, puisqu’en me faisant ce bien, c’est du mal qu’elle souhaitait à la pauvre recluse ?

Je pensais à Yette, qui était au ciel, parmi les anges, et dont j’avais figuré le personnage durant toute une matinée… ; j’y pensais, en me disant que c’eût été une bien désirable félicité que de me trouver là, pour jamais, avec Mme Veydt. Quelque chose de si visiblement pur, de si délicatement surnaturel émanait de cette malade, fine et blanche au milieu des pâles fleurs et des feuillages rouillés de son triste jardin, que cette image devait inspirer aux plus prosaïques des idées d’au-delà.

À partir de ce jour, la pensée de ma mère ne me quitta plus… Et c’était parmi les créations les plus éthérées de mon esprit que je la plaçais, dans quelque paradis immobile, silencieux, illuminé d’un soleil très tendre vague champ-élyséien où erraient des formes blanches, fines, légères et lentes comme elle.