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ÂME BLANCHE

tâchais à m’initier à tout ce que mon ami entreprenait pour notre prospérité. Il avait insisté pour qu’on vînt visiter les Tilleuls seulement lorsqu’il jugerait la métairie digne de recevoir notre visite.


Ce jour arrivé enfin, ma tante montra si peu d’entrain devant la perspective du voyage que nous dûmes décider, mon oncle et moi, de nous rendre sans elle à Vichte-Sainte-Marie.

C’était un dimanche d’avril, par une de ces matinées de premier printemps où l’atmosphère a une limpidité de cristal. Une avenue de tilleuls donnait son nom à la propriété ; elle s’ouvrait devant la grille d’entrée. Quand nous arrivâmes à la ferme, ce qui me frappa surtout, ce fut le verger au fin gazon d’un vert d’émeraude, planté de pommiers, de poiriers, de néfliers, de cerisiers blancs de fleurs, tandis que, sur la très vieille muraille de briques, les pêchers et les abricotiers étendaient des branches noires où les corolles d’un rose vif, frémissantes sous la brise, semblaient des papillons captifs.

Sous les arbres, dans un rayon de soleil, des vaches et leurs veaux paissaient non loin de la Lys, sur les berges de laquelle les crocus et les jacinthes mettaient des tons d’or et d’améthyste. Du reste, les fleurs étaient partout : au jardin d’agrément où des pivoines écarlates et nacrées s’épanouissaient, somptueuses, à côté des tulipes