Page:Wiele - Ame blanche.djvu/95

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

X


Vers ce même temps, et, comme mon âme, étrangement affinée, souffrait beaucoup de la tristesse de ma situation parmi ces vieilles gens qui m’aimaient peu, le souvenir adorant conservé à ma mère s’exalta. Je commençais à en vouloir aux Veydt de ne jamais m’en parler, de m’élever, ainsi qu’ils m’élevaient, dans la méconnaissance, dans l’ignorance presque absolue de cette mère, vivante, pourtant !… alors qu’on m’inspirait un véritable culte pour mon père mort. Je sentais là un parti-pris, une iniquité qui blessaient mon implacable justice enfantine et, bien que chérissant ardemment la mémoire de Jules Veydt, ce héros que je n’avais guère connu, je ne pouvais admettre qu’on lui sacrifiât la douce innocente dont mes yeux gardaient une vision si exquise et qui avait pleuré son mari jusqu’à en perdre la raison.

— Je voudrais voir maman, dis-je, un matin, d’une voix très ferme, à ma tante Josine, occupée à ranger des poires sur une étagère, dans le fruitier.