Page:Young - Les Nuits, trad. Le Tourneur, t. 1-2, 1827.djvu/51

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pable. Vous fuyez en vain dans le fond des forets : vous n'empêcherez pas les chagrins de vous y suivre. Souvent nos précautions mêmes nous exposent davantage, et les pas que nous faisons pour éviter la mort, nous la font rencontrer. Le bonheur même ne donne jamais ce qu'en promet le nom : nous nous étonnons tous les jours de trouver tant de différence entre ce bonheur que nous cherchons et l'objet que nous avions confondu avec lui. Nos désirs sont accomplis et nous ne sommes point satisfaits. La vie la plus fortunée a ses peines. Le cours le plus doux de la nature nous fatigue. Nos meilleurs amis nous offensent sans le vouloir : ils sont innocens, et notre repos est cependant troublé. Sans accidens, que de calamités! Que d'hostilités, sans ennemis! Ah! nos maux sont innombrables, et je n'ai pas assez de soupirs pour en donner un à chaque espèce de misère.

Que la partie de ce globe occupée par l'homme est petite! Le reste n'est qu'une étendue stérile et désolée; des rochers, des déserts, des mers glacées, ou des sables brûlans, sauvages repaires des monstres, des serpens, des poisons et de la mort. Cet affreux