Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/151

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défoncerez plutôt à coups de talon ! — il ne s’envolera pas. Bertrand, le maréchal, il ne m’a point entendue quand j’ai crié. Vous pouvez être bien tranquilles. Restez point là plantés comme des idiots. Approchez. C’est-y moi qui vous fais peur à cette heure ? Je vous connais bien. Toi, Crozant, t’as travaillé en face, chez maître Mathieu, l’année dernière. T’as-t-y oublié que j’allais te porter du vin dans un pot, au plus fort de la chaleur ? Et ta mère, qu’est défunte, elle était camarade avec ma plus jeune. Une bonne mère que t’avais là, mon petit gars, si douce quand elle te tartinait des confitures, quand elle te regardait de ses beaux grands yeux, comme si qu’elle avait su qu’elle te regarderait pas longtemps, et comme si qu’elle avait deviné que son petit moutard, qu’était pas méchant à l’époque, il tournerait si mal. Pauvre chère femme qu’est au ciel et qui te regarde encore… Crois-tu qu’elle pleure point en ce moment à te voir là, avec ton couteau, prêt à couper la gorge à la vieille Marie ? C’est comme toi, mon Lereduc, que ton père est pompier et que c’est un si fier bonhomme ! Lereduc, je l’ai vu s’en aller dans le feu comme moi j’entre dans mon potager, le jour que brûlait la vieille grange à Mathieu, là, en face. « Vive Lereduc ! » que les gens criaient. Tout le village en était électrisé.