Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/158

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— Mais qui c’est qui vous avait dit de faire ça ? Ils s’entre-regardèrent avec une douceur d’agneaux. La décantation accomplie, il ne restait plus en eux — tout le limon tassé, pressé, introuvable au fond de leurs âmes — que le meilleur de l’homme, et par-dessus le meilleur, l’excellent, c’est-à-dire l’amour. Lereduc ne dit pas que Crozant avait parlé le premier « d’un coup à essayer ». Ni Crozant que Lereduc avait indiqué la mère Marie comme « intéressante ». D’ailleurs, le savaient-ils encore ? Ils prononcèrent presque ensemble la phrase qui sort, et avec sincérité, de toutes les bouches criminelles, une fois l’exorcisme du mal achevé, cette phrase que tous les avocats et les casuistes judiciaires connaissent bien :

— Nous ne savions pas ce que nous faisions. C’était plus fort que nous.

Car presque tous les coupables dégagent ainsi leur moi véritable, leur « personne » au sens absolu, du personnage qu’ils ont joué dans la période du crime, comme s’ils dénonçaient une complicité nouée un temps, dénouée ensuite, avec un partenaire maudit. Singulière attestation de l’esprit du mal et de ses mariages avec l’âme de l’homme !

Qu’ils eussent été fous, un moment donné, la simple et lucide bonne femme ne le mettait pas en