Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/56

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— Mon cher ! Un tel document !

— Tu n’as pas l’intention de t’en servir, j’espère ?

— Pourquoi pas ? La Vérité est sacrée. Elle doit éclater, toujours. Il faut que l’humanité apprenne à juger ses idoles. On ne peut la tromper en tolérant son culte pour de faux prophètes.

Mandrier fut interrompu par Le Goff qui venait insister pour que ces messieurs prissent un léger repas, car il était déjà dix heures.

— Merci, Le Goff, dit Fleuriot, mais nous n’avons pas faim. Ouvrez-nous seulement la fenêtre car on sent un peu trop les fleurs ici.

Une bouffée sonore de cloches entra par-dessus le bruit du torrent ; les cloches des messes de minuit attachent chaque année entre les hommes des liens étranges — une heure par an ; — des liens qui, à l’infini, accroissent l’individu. Mandrier vit une église de village toute transparente de lumière dans la nuit. Fleuriot, une petite galoche d’enfant d’où sortait un paquet rose.

Il se défit de sa réminiscence comme d’un duvet qui vous colle aux habits et dit à Mandrier :

— Tu médites d’écrire sa vie. Ne le nie pas. Une vie sincère, n’est-ce pas, où tu le montreras tel qu’il fut, avec l’ulcère qu’il eut à la jambe droite, il y a trois ans et que Le Goff, les bras pleins de linges, soignait en cachette, et les tares humaines