Page:Yver - Cher coeur humain.djvu/63

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d’Henri IV et son plus cher capitaine, tué au siège de Rouen. La lettre du Roi à sa veuve, encadrée d’argent, pendait au mur de l’est et l’on avait gardé le meuble du temps, y compris le lit à baldaquin dont trois siècles avaient détissé le damas bleu ; on en voyait la chaîne déteinte qui appelait le battant et la navette.

Le jeune officier, assis entre les pattes torses d’une table qui s’en allait en poudre, faisait face au duc timide à la moustache blanche. Il abattit ses cartes. Sa jeunesse fringante, plus assurée que les soixante ans de l’ancien sénateur, alla droit aux chiffres. Il aimait mademoiselle de Charlemart, certes. Mais les Morancy étaient pauvres, bien que remontant comme les Charlemart à saint Louis… Ici le duc sourit à cet enfant ignorant. Hésitant et comme écrasé sous l’avalanche héréditaire de gloire et de pureté qui s’abattait sur lui chaque fois qu’il invoquait ce sommet, le doigt sur le nez, il rectifia :

— Charles Martel, nous autres.

Le jeune homme reçut aussi la commotion. Il n’était personne qui, à entendre ce nom, n’en subît comme un choc la puissance légendaire. Quoi ! connaissait-il si mal l’armorial ? Ce grand monsieur ivoirin était du sang de ce lion, l’assommeur des Sarrasins et le père herculéen de la Patrie ?