Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/181

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trône, — elle nous aurait retardés, — mais il faudrait, quand elle s’en ira, jeter des fleurs sous ses pas, car c’était une adorable femme.

Après le moment d’affolement qu’il avait eu tout à l’heure, il s’était ressaisi, et reprenait, avec son sang-froid, sa coquetterie et sa séduction. Rejetant en arrière une touffe de cheveux gris qui faisait ombre sur ses yeux, il alla lorgner les tapisseries et les bibelots, sa longue main osseuse à la cambrure des reins, l’ample pardessus au drap fin faisant des plis flottants autour de son grand corps émacié. Madeleine, apaisée et doucement satisfaite, le suivait des yeux. Aucun bruit ne venait de la ville. Était-ce le calme, était-ce la nuit ? Les paroles du docteur concernant Samuel agissaient en elle, et c’était avec une sorte d’exaltation agréable qu’elle pensait, qu’elle rêvait à son mari. L’idée de sa grandeur qu’elle entrevoyait pour la première fois de cette manière, lui donnait un vertige de cœur, comme si l’amour de ce grand homme l’eût placée très haut. Puis elle regardait de nouveau le vieil ami, et elle songeait : « Lui, c’est un saint ! »

La porte ouverte d’un geste brutal, Wartz entra. Madeleine se souvint de ce qu’avait dit l’oncle Wilhelm : « Il faut le faire ployer sous le poids de votre amour. »