Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/204

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ou de peur, Auburger dégagea ses épaules qui glissèrent au dossier du siège, et il en vint à n’être qu’un homme rabougri, rétréci, ridiculeusement recroquevillé dans le moule de l’étroit fauteuil. Wartz était effrayant, mais le policier ne perdait point de vue son rôle ; il n’en était pas à un affront près, et il n’eut pas le moindre geste de défense qui eût tout perdu. Samuel en fut désarmé. Le premier feu de sa colère s’éteignit.

— Et ils se permettent de parler de notre œuvre ! murmura-t-il en s’écartant, les mains aux poches du veston, les épaules secouées de mépris, ils se permettent d’y travailler, d’y mettre leur main bestiale ! Et ils veulent déterminer ces choses de l’esprit, un état d’âme national, avec ces grossiers moyens de duperie ! Mais vous ne sentez donc pas… non, vous ne pouvez pas sentir, vous, de quelle essence est justement cette œuvre de Liberté, qui doit sortir sans contrainte de la conscience nationale.

— Pardonnez, monsieur le ministre, vous savez bien que je comprends tout, dit Auburger moitié penaud, moitié souriant. Vous vous figurez même à tort, je vous assure, mon incapacité de concevoir l’ordre lumineux et éthéré des choses auxquelles vous faites allusion. Vous, monsieur