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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/216

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Et, tout de suite, elle sentit s’évanouir en elle un enchantement secret qui remplissait à son insu tout son être, et dont la ruine lui donna seulement la mesure. N’être pas aimée de ce charmant homme ! n’apporter dans sa vie qu’une agréable amitié de femme jeune et spirituelle, alors qu’elle s’était crue le rayon de son automne, sa seule joie, sa raison de vivre ! Elle se voyait tout à coup très abandonnée, elle qui avait mené l’existence la plus choyée, la plus caressée. Elle était rapetissée, humiliée, par cette politique qui prenait les hommes si souverainement et d’une manière telle, que auprès d© cette force, les tendresses de l’amour n’étaient rien.

Elle s’était trompée. Saltzen ne l’aimait pas. Elle en eut le cœur gros tout le soir, et, à peine au lit, elle pleura silencieusement sur l’oreiller qui longtemps demeura humide et froid. Quelle place tenait cette illusion dans ses pensées ! et comme elle avait le dégoût de tout, maintenant ! Ainsi, sans elle, il pouvait vivre très satisfait ; ses occupations intellectuelles le contentaient. Combien de sa part l’erreur avait été ridicule ! S’être crue aimée ! S’être crue aimée par un homme de cet âge !…

L’engourdissement du sommeil la prenait tout