Aller au contenu

Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/225

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

les têtes chaudes des comités républicains. Dès lors, ce fut une masse si compacte, que le second tronçon de la rue du Canal ne la contenait qu’à peine. Il s’y formait des poussées inexpliquées ; ici ce fut une bousculade ; le parapet vermoulu céda ; une femme tomba dans l’eau. On la sauva. Ce fut un enthousiasme délirant, dans cette foule aux nerfs tendus. On entama l’hymne national, et le chant, cahoté aux secousses du long serpent humain, devint si puissant, clamé par tant de voix, que ce fut à travers la ville comme une musique de ralliement, au son de laquelle on accourait de tous côtés. En arrivant sur la place de l’Hôtel-de-Ville, les manifestants étaient cinq ou six mille. Inopinément, la grande statue de bronze du roi Conrad se dressa devant eux, maintenant d’une main l’élan de son cheval cabré, saluant de l’autre avec la petite toque de la garde royale.

La haine des rois les prit à cette vue ; ils oublièrent Wartz, pour insulter celui qui n’avait été dans l’histoire que son précurseur ; et changeant de voie, brusquement, ils se portèrent, en mouvements pesants, vers le socle du monument. Ce fut une brutale éclosion de rage et de démence. On voyait grouiller ces hommes et ces femmes, le