Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/237

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Et le flot gagna jusqu’ici. Il roula dans les galeries. Ce n’était plus la Bête monstrueuse, puissante, audacieuse et terrible, c’était le troupeau qui s’aventurait craintif et méchant en des pacages défendus, un régiment de paletots crasseux, de gilets décolorés, de chemises sales se frottant aux rondeurs glacées des colonnes d’albâtre, au vernis des cimaises peintes, allant sans savoir où, perdu, cherchant la dame en noir qui se cachait.

Ils allaient droit devant eux. On entendit un cliquetis de lames ; c’était ceux qui, ayant découvert la salle d’armes, décrochaient des épées aux panoplies. Les panoplies figuraient de grands soleils rayonnants. Ils laissèrent l’astre que formait un bouclier, mais chacun détacha un rayon. Les plus fougueux gravirent l’escalier et rencontrèrent, là-haut, l’enfilade des salons. Certaines salles se trouvaient obscures ; l’un d’eux prit un candélabre dont il alluma les bougies, et le brandît en l’air en criant :

— Chasse ! Chasse !

C’était la Reine qu’on chassait.

Le mot cingla ces hommes comme une meute ; ils bousculèrent les chaises blanches à membrure d’or, les guéridons frêles où se mouraient des