Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/269

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ridon de l’antichambre. Les glaces, au passage, furtivement, reflétaient sa belle forme noire, et l’on sentait si bien la ruine irréparable, la fuite définitive, qu’on aurait souhaité que ces miroirs princiers, aux cadres de fines moulures dans les trumeaux, gardassent au moins dans leur eau mystérieuse, cette suprême vision, auguste et lamentable.

Ils atteignirent un vestibule ténébreux. Les clartés jaunes de la petite lampe furtive faisaient apparaître aux murailles, des reliefs effacés d’ornements gothiques : armoiries ou arceaux qui s’effritaient. Et cette femme dont une angoisse secrète hâtait la marche, traînant l’enfant à demi somnolent dont les petits pas résonnaient dans le corridor glacial, quittait ainsi le palais où vingt-deux rois, ses pères, avaient régné. Celle que tant d’ovations avaient saluée, au grand soleil des jours d’été, dans les fêtes populaires, s’en allait secrètement, sous la tutelle d’un ennemi, à la lueur d’une lampe d’antichambre, par les corridors moisis où se salissait sa traîne noire. Et l’on aurait cru voir le fantôme de la monarchie expirante errer dans ces lieux clandestins et sinistres, ouvrir en soupirant l’huis rouillé de la rue aux Moines, et la lampe soufflée, misérable, vaincue, abandonner