Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/312

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tel jour incertain de leur union, le cœur de sa femme pouvait cesser de lui appartenir tout à fait. Et ils auraient beau maintenant se dévouer l’un à l’autre, se chérir, s’aduler et s’étreindre, la cruelle lumière serait toujours là, leur montrant les limites véritables de ce qu’ils croyaient infini.

Tous deux souffraient ; mais Samuel gardait l’immense compensation de sa gloire, avec le sens voluptueux de sa puissance en travail, tandis que Madeleine endurait sa douleur sans allégeance. Elle l’endurait avec douceur ; sa pure conscience y cherchait un châtiment à sa faute, elle y sentait le poids de la main de Dieu la punissant, et elle aimait cette douleur, comme font les femmes. Bien plus, la première indignation tombée, son âme retourna vers Samuel, brisée, blessée. C’était une chose bien claire, il ne l’aimait que d’un amour tronqué, étouffé par l’autre passion plus violente de sa politique. Elle en était humiliée ; c’était l’irrévocable désenchantement de sa jeunesse, un bonheur s’envolant d’elle pour toujours, mais elle pardonnait sans presque le savoir, dans le tréfonds obscur de sa rancune. Et pendant que, dédaigneuse encore de lui parler, elle s’efforçait de ne le pas rencontrer, elle rôdait inquiète autour de sa chambre, de son cabinet, elle épiait tous ses actes, et quand