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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/322

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— Mon cher collègue, voulez-vous que nous allions ce soir chez Saltzen ?

Samuel dut le presser, car il reprit :

— À votre gré, je suis tout à vos ordres.

Madeleine se leva, et, ravagée d’angoisse, vint se regarder au grand miroir cloué au mur. Elle crut voir dans ses yeux troubles, dans ses lèvres pâles, les traits d’une pécheresse détestée. Tout amour-propre s’éteignit en elle, soudain ; elle se haïssait. Tant de mal venait d’elle ! En cette affaire, l’entière responsabilité pesait sur elle ; elle en était le pivot, la source perverse. Oh ! oui, pécheresse, pécheresse secrète du cœur, pécheresse raffinée, masquée de pudeur, d’honneur, de vertu, et dont les fautes cachées avaient conduit de tels hommes à de telles haines ! Saltzen et Samuel Wartz se détestaient à cause d’elle, à cause de ses coquetteries, de cette volupté d’aimer, d’être aimée, de goûter à des sentiments quintessenciés qu’elle avait eue et qui l’avait menée là !

Il y avait d’autres femmes coupables, portant le poids de fautes plus réelles ; elle connaissait, dans la société même d’Oldsburg, de belles et franches libertines qui ne mettaient pas d’autre barrière à leur champ de plaisirs qu’une fragile retenue transparente de bon goût, de discrétion, à travers la