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Page:Yver - Comment s en vont les reines.djvu/323

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quelle chacun suivait l’élégant scandale de leur vie. Celles-là lui semblaient tenir un rang moral au-dessus d’elle, à cause de ce péché subtil, exonéré du blâme, inconnu, mystérieux, qu’elle avait commis dans son cœur, hypocritement.

Elle aimait à l’excès la justice. Elle était juste dans toutes ses pensées, dans toutes les sévérités de sa conscience, juste comme une femme l’est rarement. Elle n’attribua pas le malheur qui les frappait tous trois à la franchise qu’elle avait eue envers Samuel, mais à sa propre culpabilité. Et, dès ce moment, elle prit la décision de l’acte qu’elle accomplirait bientôt.

Le repas lui ramena Samuel. Elle le voyait pour la première fois depuis la veille. Il l’effraya. Ses traits pâles, sa face incolore n’avaient pas changé ; c’était seulement son regard. Les domestiques étant présents, ni Madeleine ni son mari ne purent rien laisser paraître de ce qui les torturait ; mais leurs yeux s’entrecroisaient, se cherchaient, et ceux de Samuel n’avaient jamais eu, à ce point, cette ambiguïté troublante, l’expression double, ce mélange de douceur et de dureté qui exerçait sur la jeune femme un magnétisme implacable. Elle comprit cet alliage d’amour et de fureur qui le possédait actuellement, qui le poussait contre