Page:Yver - La Bergerie.djvu/152

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de l’an passé qui dansaient au-dessus de sa bottine. Son corps vigoureux d’adolescente était un triomphe de santé ; elle allait d’un pas ferme, le col nu, portant au bras sa pèlerine. Le vent faisait dans ses cheveux des envolées de mèches onduleuses, et, de toutes ses forces, elle chantait des airs sans suite, improvisés à la file, valses, danses, mélodies qui scandaient le pas des marcheurs sans qu’ils s’en doutassent.

Peu à peu, les fiancés hâtèrent le pas ; ils avaient à se dire des choses que Camille n’avait nul besoin d’entendre, Frédéric les vit s’en aller hors de portée de voix. Il pensa : Chapenel a tort et ils ont raison. Camille faisait des roulades ; le soleil se montra ; aussitôt une alouette lui répondit. C’était une matinée de printemps hâtif, lourde et tiède. La fillette se retourna, montrant le couple loin devant eux déjà.

« Regardez-les ! » dit-elle.

Elle était à la fois moqueuse, indulgente et complice. Elle avait eu pour ce geste vers Frédéric un air entendu, l’air d’une personne qui sait à quoi s’en tenir, qui connaît le fond des choses. Elle disait toujours, d’ailleurs, en parlant des fiancés « les amoureux », à quoi sa marraine soupirait que les enfants d’aujourd’hui sont beaucoup trop avancés pour leur âge.