Aller au contenu

Page:Yver - La Bergerie.djvu/46

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

« Pourvu qu’elle n’épouse pas un jour ce frère de curé qui doit être un sot, pensait-il en la cherchant derrière les troncs comme une petite nymphe fugace.

— Ton père vivait dans ce parc, disait Mlle d’Aubépine ; l’hiver comme l’été, il y travaillait avec son précepteur, car c’est seulement à quinze ans qu’il fut mis à Saint-Lô. Tiens, il écrivait ici, sur ce tronc coupé en forme de table : il s’est formée tout autour une jeune cépée ; ne trouves-tu pas que ces troncs ont l’air d’avoir poussé pour protéger cette relique de leur jeune maître disparu ? »

Frédéric y pensait. Il était sous une influence romanesque qui lui faisait voir les bruissements de forêt de ce parc riche en arbres, les frissons des feuillages, les fraîcheurs lumineuses des gazons, l’odeur d’écorce humide, les chants d’oiseaux, comme un bonheur végétal de la nature à le reconnaître. « Certains oiseaux vivent très vieux, pensait-il ingénument ; qui sait si l’un de ceux qui chantent là ne chantait pas aussi de son temps ! » Par instant, tel un fil sans poids qu’on lance, que le vent porte et qui s’enroule, la phrase de la valse lente, fine et flottante en l’air, arrivait jusqu’ici et l’enlaçait. La-sol-fa-do… Comme la Bergerie reprenait bien l’enfant perdu ! Comme il se sentait bien, ici, être un d’Aubépine ! Et les grands hêtres, un peu penchés par le