Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/18

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des baux, des minutes en général, des actes sous seing privé possède sa musique particulière où le jeune Hyacinthe eût réussi comme ses aïeux notaires. Mais il était encore en robe — et comptait donc d’après ce détail moins de cinq ans d’Âge — qu’une passion naquit en lui frénétiquement, s’alluma pour mieux dire, en présence de la crèche de sa cathédrale où l’Enfant Jésus lui apparut enveloppé d’une tunique rose, d’un rose aussi ravissant que celui des écharpes qui traînent dans les ciels du Finistère à l’aurore, surtout quand il y a eu tempête en mer. Et ce rose d’une tendresse voluptueuse chantait d’autant plus fort du fait d’un certain manteau vert émeraude que portait le saint Joseph en adoration. Ce petit garçon émerveillé demeurait comme en extase. Ce que sa bonne mère la notairesse imputa à piété précoce n’était autre chose que la révélation de la couleur à un enfant mystérieux, dans un pays où elle est rare et précieuse. Ce rose de la robe vêtant le petit Jésus devait résonner en lui toujours comme la note d’un diapason perpétuel qui ne cessa de vibrer et de lui donner le ton.

À huit ans, au bazar de Quimper, Hyacinthe Arbrissel acheta une petite palette de carton où étaient rangées les sept couleurs en pastilles rectangulaires, et se mit à barbouiller les catalogues de modes que Mme Arbrissel recevait de Paris noir sur blanc, déjà désolé de n’approcher jamais, avec ses moyens matériels inexistants, la réalisation du rêve coloré qui était en lui, y allumant une soif inextinguible. Il souffrait un peu du vert aride et bronzé des champs de