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Page:Yver - Le Fils d Ugolin.djvu/52

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tations, transmit à son mari cette réponse du préfet des études, Arbrissel frémit des pieds à la tête. Il eut sur sa femme un regard déchirant : « Vous voulez m’arracher mon seul vrai bonheur ! dit-il d’une voix éteinte, — Et moi, que suis-je donc pour vous alors ? » s’écria-t-elle. Et les larmes lui perlaient aux yeux. « Je n’ai pas trop de vos deux amours ! » soupira le peintre, incapable de celer entièrement sa voracité sentimentale. C’était un insatiable. Il ne pouvait goûter de contentement si d’autres désirs impérieux en lui n’avaient pas été satisfaits. Pour leur accomplissement il employait autant de génie secret qu’à réalisec sur la toile sa vision intérieure. Non, jamais il ne pourrait renoncer au divin plaisir — son dernier coup de pinceau donné — de descendre à la salle à manger pour y retrouver ce petit dieu qui se précipitait dans ses bras, aussi doux, aussi ardent que l’Amour même.

À la fin, ce fut Hyacinthe qui gagna la partie. La nourrice de Pierre, demeurée à la villa en qualité de femme de chambre et qui avait laissé le bonnet ruché pour reprendre le hennin carré et la gorgerette empesée des filles de Quimper, fut chargée d’escorter matin et soir l’allée et la venue du petit écolier nouveau.

Hyacinthe Arbrissel n’en considéra pas moins comme une épreuve sévère ces Journées nouvelles dépouillées d’une présence trop chère : « On m’arrache mon fils, prétendait-il ; chaque jour un peu plus ma vie est amputée de lui. Les dominicains s’en emparent. » Et, avec la fièvre d’un écolier, il se mit à attendre les jeudis et les dimanches qui lui rendaient son idole. C’était