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Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/161

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— Les tantes ressemblent à deux chars funèbres, ne trouvez-vous pas ?

Un moment, la comtesse Thaven, fort affairée et qui conduisait la fête, s’approcha de l’archi-duchesse et lui demanda si l’on pouvait compter qu’elle patinât. La jeune fille très secrètement répondit que oui, que son genou fonctionnait bien et qu’elle était suffisamment habituée à la glace pour l’affronter aujourd’hui, quoique boitant un peu. Alors Clara surprit une discussion chaude et mystérieuse entre la reine et la grande maréchale. Gemma inquiète, alarmée, se refusait à admettre qu’on exposât sa fille à une chute qui pourrait ramener de nouveaux accidents tandis que la hautaine maréchale, dont l’autorité morale dirigeait bien des choses à la cour, semblait exiger que ce geste de parade eût lieu. Alors Clara comprit le sens de toute cette fête. Il fallait montrer, dans un jour comme celui-là, le précieux bibelot national, mettre en avant cette idéale beauté de la future souveraine, exciter l’imagination des jeunes soldats présents, impressionner les journalistes qu’on tolérait dans le parc, avec quelques invités triés. Ce divertissement, futile en apparence, cachait de profonds, de graves et politiques desseins. C’était une représentation offerte à la nation pour entretenir le prestige royal. En effet, la reine apparaissait tout autre, somptueuse, altière, imposante, et, Clara le remarqua, cet