Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/244

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homme, et le vieil homme d’État s’étaient pris de querelle, mais d’une querelle tragique où l’un, écumant de colère et étouffant de réserve, de contrainte religieuse, clamait magnifiquement sa théorie du pouvoir absolu, pendant que l’autre, dilettante et sentant ce joug du vieux serviteur, en arrivait aux mots cruels. Il était une heure du matin quand le duc de Zoffern jeta au roi sa démission. Wolfran l’eût acceptée, excédé qu’il était de la doctrine et de l’autoritarisme du grand maréchal. Mais un troisième acteur silencieux avait assisté au drame. Il y avait jusque-là joué le rôle de secrétaire modeste et curieux. C’était monseigneur Bertie, duc d’Oldany. À ce moment, il intervint. Il affecta de voir une boutade dans la menace du vieillard. Au fond, il était très effrayé. Il avait senti mieux que Wolfran ce qu’un roi pouvait faire d’un instrument si puissant et l’éclat qu’une monarchie modernisée tirerait longtemps encore de cette vieille et superbe colonne qui soutenait le trône depuis un quart de siècle. Le maréchal était, dans le monument constitutionnel tout neuf, le morceau de l’architecture antique, somptueuse et noble, qui stylise l’édifice. Bertie le lui dit carrément :

— On ne peut pas se passer de vous, duc, vous êtes la Tradition.

Wolfran comprit et repoussa le défi de l’insupportable censeur. Tout s’arrangea. L’idée de complot subsistait claire et nette ; on irait jusqu’à