Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/317

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fêtât point. C’était, il est vrai, une conversion discrète et que, de part et d’autre, on ne clamait pas hautement. La famille royale nuançait d’un ton affectueux ses rapports avec la savante, Clara montrait plus d’abandon, c’était tout. Au surplus, on parlait rarement de politique chez Gemma. À l’occasion, la grande Hersberg eût défendu chaudement les générosités utopiques de l’Union, mais intellectuellement, comme le pauvre prince Géo, dilettante et éclectique, l’eût fait lui-même La forte machine monarchique fonctionnant sous ses yeux avec la régularité, l’intensité, la puissance des bons appareils, recevait son muet acquiescement.

La rupture survenu entre elle et Kosor la laissait libre, donnait du champ à ses idées nouvelles. Mais quelle angoisse elle connaissait désormais ! Quand Wolfran arrivait à ces soirées intimes avec cet appétit de se divertir au moins un peu, cette légèreté, cette gaieté, qui trompaient sur sa gravité véritable, elle le considérait sans rien dire et pensait à ce danger blotti dans l’ombre, derrière lui. Serait-ce une bombe, une balle, un poignard ? Elle brûlait de lui dire : « Sire, gardez-vous mieux. » Mais ne le lui avait-elle pas dit souvent et ne s’était-il pas ri de ses craintes ? Elle songeait. « C’est peut-être la dernière fois que je le vois. » Et son amitié se faisait plus tendre, plus inquiète, plus délicieuse. Elle pensait « Rien au monde n’est plus beau que l’amitié. »