Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/333

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me trouver enfant, me dédaigner un peu, vous irriter peut-être…

Il secoua la tête et ne répondit rien. Il l’enveloppait d’un regard persistant et douloureux. À la fin, elle lui tendit la main en soupirant :

— Mon pauvre Bertie !

Clara fut le seul témoin de ces fiançailles dépourvues de joie, d’espérance, mais non de grandeur. Les deux êtres d’exception qui se promettaient là de vivre l’un à l’autre en dehors de l’amour, s’unissaient cependant dans un sentiment supérieur : ils communiaient dans le désir froid et pur de la félicité d’un peuple. C’était une nation que cette frêle jeune fille apporterait au duc dans les plis de sa robe nuptiale ; elle était la Lithuanie qui se vouait, en cette nuit solennelle, au génial homme d’État.

Il était tard quand ils rentrèrent en gardant un silence absolu ; les mots qu’ils se seraient dits eussent trop diminué ce qu’ils sentaient dans le secret de leurs âmes. Mais l’archiduchesse avait retrouvé la douceur et la paix. Son cœur. désormais orienté et maté, était soumis ; l’ordre régnait en elle.

Quelques jours après, les journaux d’Oldsburg commencèrent à parler des fiançailles officielles de l’archiduchesse et du duc d’Oldany. Le pays en accueillit diversement la nouvelle. Le choix d’un prince de petite lignée étonnait, son âge désenchantait, sa figure déplaisait aux femmes.