Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/362

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haineux, terrible, tout convulsé les poings serrés, frémissant. Elle eut la certitude que toute imploration serait désormais inutile, que Wolfran était définitivement condamné. Alors l’angoisse la prit. Elle aurait voulu pouvoir donner sa vie se substituer à Wolfran, mourir à sa place. Soudain elle eut une inspiration : « Il dit que je l’aime. Aimer, c’est se donner toute. On peut se donner, s’immoler de différentes manières… »

Une hésitation l’arrêta encore une seconde ; puis, s’avançant tout près d’Ismaël, se faisant plus caressante, plus persuasive, elle murmura :

— Écoute, Ismaël, laisse là ces divagations. Tu me soupçonnes ? Pour qui me prends-tu donc ? Tiens, veux-tu que nous quittions Oldsburg, l’humanité se sauvera sans toi. Jusqu’ici tu as gâché ta vie sans rien obtenir pour la cause. Partons ensemble, je t’aimerai ; nous serons heureux, nous ne nous quitterons plus…

Il la dévisagea froidement, cruellement, les bras croisés, haletant de colère.

— Femme perfide, perverse comme les autres, tu veux me tenter bassement. Tu l’aimes à ce point que, pour le sauver, tu t’offres à moi que tu hais. Ah ! Clara, Clara, tout s’illumine pour moi. Tu ne m’as jamais aimé, et c’est aujourd’hui que tu veux être mienne… Moi qui t’avais placée si haut !…

Elle s’avança pour l’enlacer. Il la repoussa brutalement.