Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/46

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— Tu le sais bien, mon ami, celui d’y vivre avec toi le jour où la cause aura triomphé, où nous aurons droit au bonheur, l’ayant donné à nos frères.

Il resta silencieux, abattu ; puis, au bout d’un instant, d’une voix sourde :

— Je voudrais être le chien qui te garde, le serviteur qui t’obéit, le tapis que tu foules, le feu qui te réchauffe, le lit où ton corps repose.

Elle lui prit la main fortement comme celle d’un enfant que l’on apaise.

— Tu es mon frère, mon ami, la lumière de ma conscience, tu seras un jour le compagnon de toutes mes heures…

— Ah ! cria-t-il les bras tendus, je t’aime, Clara !

— Chut ! dit-elle en se reculant, écoute…

Dans le débit contigu, des voix d’ivresse entamaient la Chanson du Charbon, que le petit Conrad, poète, avait écrite en vue des nouveaux décrets. C’était une complainte d’une tristesse infinie, avec des claironnements de révolte. Kosor et Clara demeurèrent muets, repris par la griserie humanitaire ; puis ils sortirent ensemble. Sur le trottoir, ils se séparèrent.