Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/73

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gauche, le premier venant de la chapelle royale, l’autre de la salle du trône. Une tourelle hexagonale aux fenêtres en ogives flanquait le bâtiment central. Une grille monumentale à volutes de fer forgé fermait la cour. La place était bleuâtre et déserte. La statue du roi Conrad se dressait au centre. À l’extrémité de la rue du Beffroi apparaissait la pâle cathédrale de Saint-Wolfran, dont les tours inégales, l’une effilée et l’autre trapue, blanchissaient et s’ouataient au clair de lune, tandis que la flèche d’un noir cru pointait vers un ciel gris perle.

Ismaël et Clara s’engagèrent dans l’avenue de la Reine qui descendait vers les quais. De lourds monuments la bordaient, dont on voyait les fenêtres étinceler derrière la ramure dépouillée des files de platanes. C’étaient les ministères, leurs bureaux, leurs salons, leurs archives. Ces bâtiments massifs, la vie intense qu’on y devinait les impressionnèrent, comme l’eussent fait des forteresses imprenables. La vie, d’ailleurs, on la sentait partout dans la ville, hâtive, empressée, haletante en cette fin de jour. Les camions chargés de coton filé roulaient vers les magasins excentriques, d’autres amenaient aux gares de gigantesques rouleaux qui étaient des pièces de toile neuves tissées. Sous terre, un grondement périodique annonçait le passage des trains de Hansen emportant des marchandises vers le grand port lithuanien. Des camelots arrivaient