Page:Yver - Le Metier du roi.djvu/80

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palais féerique régnait dans une vapeur verdâtre qui le rendait presque irréel. Puis, alentour les églises lançaient leurs clochetons et leur tour, et la métropole, Saint-Wolfran, sa flèche noire et géante. Soudain, Kosor s’arrêta net, il toucha le bras de son amie, ses pupilles s’élargissaient, ses yeux se dilataient sous l’effet de quelque vision intérieure.

— Clara, dit-il sourdement, Clara, il faut aller au palais.

Elle fut interdite à son tour, et son sourire laissa entendre qu’elle croyait à une ironie.

— Si j’ai encore quelque ascendant sur toi, écoute-moi, Clara, accepte ce poste. Tu iras au palais, je te le demande, je le veux.

— Mais pourquoi, reprit-elle, enfin doutant vraiment encore qu’il fût sérieux, pourquoi ce mensonge à toute ma conduite passée, cette vie de dame d’honneur au milieu de la domesticité chamarrée, dans un milieu que je méprise ? Quelle sorte de personnage jouerai-je là ? Je hais le roi.

Kosor la dévisagea tendrement.

— Pauvre amie, je crois bien que tu ne hais personne, tu as le cœur le plus doux, le plus conciliant, et ta grandeur est telle que, même dans ce milieu, tu continueras ta vie simple et belle de femme de science. Oui, oui, va au palais. Je sens proche l’heure de l’action. Ma destinée s’illumine et se précise. Tu m’as conduit au faubourg au milieu de la formidable activité