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Page:Yver - Les Cervelines.djvu/118

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Et maintenant, maintenant, songez-vous à cela ? la perdre, ma pauvre Henriette !

Le lorgnon tombé, la tête fléchie et douloureuse, il étalait à plaisir devant elle son chagrin, comme un mendiant fait montre de sa misère pour apitoyer. Il avait tant besoin à ce moment de sa compassion, d’un mot affectueux de ses lèvres, un seul mot qu’elle aurait pu dire avec un mouvement vers lui et qu’elle ne dit pas ! Elle paraissait simplement ennuyée de cet aspect soudain et larmoyant sous lequel le docteur lui apparaissait.

— Bast ! Vous ne la perdrez pas… en la soignant bien… finit-elle par dire.

Tisserel s’approcha d’elle encore.

— Vous viendrez, n’est-ce pas ? vous viendrez chez moi après la visite ; je veux que vous la voyiez. J’aurais pu demander au docteur Le Hé. trais de venir, j’aime mieux que ce soit vous. Il me semble que c’est vous qui me la rendrez ; vous viendrez, n’est-ce pas, mademoiselle Bœrk ?

Elle rit.

— Si vous y tenez tant, oui, mais que ferai-je de plus que vous, docteur ?

— Vous avez une grande science, une grande intelligence des malades. Cette responsabilité de sa vie m’écrase ; je crois plus en vous qu’en moi même. Et il me semble bon de l’abandonner à vous, la pauvre petite fille.

Il en arrivait à ne plus pouvoir retenir les mots de sa passion.

— Si vous saviez, si vous saviez ! murmura-t-il !

— Eh bien ! oui, reprit-elle nerveusement, j’irai et c’est entendu.