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Page:Yver - Les Cervelines.djvu/175

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— À midi, vous entendez, d’Ouglas, à midi je reviendrai ici et vous me le remettrez.

— Et c’est à vous aussi, docteur, que je devrai faire des excuses ? reprit-il, gouailleur. Pardonnez-moi de n’avoir pas compris plus tôt…

— Quoi ?

— Je veux dire que je n’avais pas cru vous offenser de la sorte, et que je m’excuse, en effet, dès maintenant, docteur, très sincèrement. Pour le collier, le voici, ajouta-t-il en mettant la main sous le traversin où il l’avait caché ; c’est à regret que je vous le donne. Il m’était d’un grand prix.

Et il fit une espèce de soupir dont l’ironie révolta Tisserel. Mais Tisserel avait maintenant le ruban dont il sentait le velours mou s’écraser dans sa main. Il le serrait gourmandement, comme le gage de mystérieux bonheurs. Il ne s’occupait plus d’avoir été joué par ce jeune homme, d’avoir donné sa passion en pâture à l’ironie de cette bande, d’être ouvertement le chevalier servant et malheureux de la cruelle Cerveline. Il protégeait entre ses doigts, avec toutes sortes de respects, le collier. Il lui semblait tenir une chose de feu. Il se hâta de sortir, laissant d’Ouglas rire à l’aise de l’aventure, et dans le corridor il chercha naïvement, bêtement, un coin désert pour un baiser furtif sur le velours.

Il tira sa montre, vit qu’il avait encore une demi-heure avant le temps de la visite, et s’en alla demander à la porterie si M. le docteur Le Hêtrais était arrivé.

— Il vient de passer, lui dit-on.

Le directeur de l’École avait au-dessous de l’hôpital militaire, dans le bâtiment du fond de la