Page:Yver - Les Cervelines.djvu/28

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Le docteur reprit, sans pouvoir réprimer l’éclair de joie qu’eurent ses yeux :

— Cécile et moi nous l’avons vue aussi ce soir de la terrasse du café. Cécile ne la connaissait pas.

— Avait-elle sa cape jaune ?

Elle attendait toujours une confidence de sa part, mais chaque fois qu’ils parlaient de mademoiselle Bœrk, leurs propos n’étaient basés que sur certains détails extérieurs de sa personne ; il y avait après cela une limite que Tisserel n’enfreignait jamais. Il était confus, inconsciemment, d’avouer, devant la solide et généreuse affection de sa sœur, ce qu’il éprouvait pour l’insensible fille dont il n’attendait que du chagrin.

— Elle avait sa cape jaune, comme toujours, répondit-il.

— Et monsieur Cécile, comment l’a-t-il trouvée ?

— Charmante.

Et comme onze heures sonnaient à toutes les pendules, du haut en bas de la maison silencieuse, le frère et la sœur s’embrassèrent une dernière fois, et se quittèrent. Prestement, d’un mouvement vif qui fit battre les tresses sur les plis de sa taille, elle s’enfonça dans sa chambre : et là, réfugiée en hâte devant la glace, pendant que ses yeux disaient son amertume, elle laissa tomber de ses lèvres, avec l’intonation qu’avait eue le docteur, ce seul mot :

— Charmante !

Cette rêveuse et tendre fille avait dans le cœur un sentiment caché pour le docteur Jean Cécile.