Page:Yver - Les Cervelines.djvu/290

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embelli, pour ce qu’on lui a donné et pour ce qu’il a rendu le métier. Éteindre, Marceline, ce flambeau lumineux de votre enseignement, taire ces conférences où se complaisent tant d’intelligences fines sur qui vous entretenez une adorable autorité, renoncer à ces apothéoses délicates que vous offrent les esprits, à ces triomphes qu’on vous a faits parfois, où je vous ai connue un soir, mon amie, c’est, il me semble, commettre en même temps une grande injustice et un grand sacrilège ; est-ce assez que votre bonté d’un côté, et de l’autre l’immense tendresse que je vous porte pour les motiver ?… »

Si en lisant cet aveu, le soir, à l’heure qu’elle se hâtait pour sa conférence, elle n’y avait vu que la honte et le regret qui étreignaient le cœur de Cécile en écrivant, elle aurait été seulement touchée ; mais une chose unique la frappa, si cruellement qu’elle en eut une sorte de colère : cette condition, ouvertement exprimée, d’abdiquer sa carrière.

Que serai-je alors, se disait-elle, que deviendra ma personnalité ? Madame Cécile : je serai madame Cécile. À quoi se passeront mes journées ? Je devrai faire des visites et, en l’absence de mon mari, seule chez moi, dans les loisirs que me laissera la direction du ménage, je pourrai lire quelquefois. À intervalles, j’aurai dans les mains un livre, comme au prisonnier on ouvre parfois, sous prétexte de pitié, une lucarne vers l’espace. Il me sera permis, de suivre les travaux des autres, leur bel essor mental qui me sera prohibé, à moi.

Cette idée du mariage lui parut soudain une