Page:Yver - Les Cervelines.djvu/315

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— Il faut toujours espérer en la bonté de Dieu. En tout cas, ses desseins sont impénétrables, mon enfant ; je vous engage à faire, dès à présent, comme acte méritoire, le sacrifice de votre vie. Le bon Dieu saura vous en récompenser, soit dans cette vie, soit dans l’autre. Imitez Notre Seigneur Jésus-Christ, qui a offert aussi sa vie. Ne vous inquiétez pas non plus hors de propos. J’ai vu, dans le cours de mes fonctions ecclésiastiques, des enfants plus malades que vous, revenir à la santé. L’an dernier, je voyageais en Italie ; en passant dans un village voisin de Pise que l’on m’avait beaucoup engagé à visiter à cause des peintures murales de quelque Raphaël inconnu, dans la petite église, j’ai vu la sœur du curé qui était à peu près de votre âge, ma chère enfant ; elle avait aussi la poitrine malade, et lors de ma visite elle était dans un tel état de faiblesse, que son frère la crut morte un certain soir. J’ai su depuis qu’elle était rétablie. Je vous engage vous confier à Dieu et à bénir ses desseins, quels qu’ils puissent être. Désirez-vous vous confesser, mon enfant ?

— Non, monsieur l’abbé, je vous ferai demander pour cela une autre fois.

C’était un homme du monde, il mit une réserve de bon goût à ne pas insister. Il répéta à peu de mots près ce qu’il venait de dire sur l’impénétrabilité des desseins de Dieu, tout en rajustant pour le départ ses gants de peau noire ternes, et il se retira, exhortant Henriette à la résignation, avec la satisfaction, l’agrément secret d’avoir fait son devoir.

Après sa visite, Henriette demeura plus morne,