Page:Yver - Les Cervelines.djvu/344

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Elle devint livide et ne répondit pas. Il la supplia :

— Marceline !

— Dans un mois, reprit-elle lentement en refaisant sans le regarder les plis de sa robe, j’aurai quitté non seulement Briois, mais l’Europe. Le romanesque ne peut pas être le fait d’une personne de ma sorte. Mon énergie et mon rêve trouveront à se réaliser là-bas, et à Beyrouth même, j’écrirai l’histoire de Tyr. Je sens ma vie si pleine ! À Paris, où j’étais les jours passés, je n’ai rencontré que des sympathies et des encouragements. J’y ai repris un regain de ferveur, j’ai fait connaître la voie que je désirais suivre, on m’y a comme lancée avec violence. Ma vocation s’accomplira.

— Je veux vous suivre…

— Je serai hébergée là-bas, continua-t-elle avec placidité, dans un monastère de religieuses françaises.

— Je vous aime !

— Mon ami !…

— Marceline, dites-moi encore ce que vous m’avez écrit : que vous m’aimez ! Donnez-moi votre amour ; soyez-moi quelque chose. Comment ! vous avez eu pitié de Tisserel quand il en aimait une autre, et vous n’avez pas pitié de moi.

— J’ai eu tort ; Jeanne Bœrk avait raison. Voyez donc, si j’avais agi toujours comme elle, vous ne seriez pas ici en larmes aujourd’hui. Voilà bien où conduit la passion : à des regrets ! Qu’aurait-ce donc été, si nous étions entrés déjà dans l’irrévocable !

— Écoutez. Je ne puis pas discuter avec vous ;