Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/112

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niser toute l’usine, est-il dégénéré ? Quant à Philippe, qui à vingt ans franchissait les Alpes à cinq mille mètres d’altitude et qui, lorsque nous tremblions pour la santé de son corps frêle, dépassait, avec des ailes de toile dérisoires, les aigles à la course, est-il l’enfant d’une race qui meurt ?

La châtelaine sourit d’orgueil à cette évocation. Le vieux couple demeura encore au balcon. Ces beaux échanges de pensée où se mêlait de part et d’autre le grain d’encens de leur adoration mutuelle, suffisaient maintenant à leur plaisir. Bientôt leurs regards, tombant vers la vallée obscure, y cherchèrent l’emplacement de l’usine. Les cheminées ne soufflaient plus qu’une buée invisible, montant du feu des chaudières endormi sous les escarbilles. Plus à droite, au creux du coteau, le tissage Taverny ronflait à tout rompre. On y travaillait la nuit, et les vitres clignotaient au loin comme des yeux qui s’ouvrent dans les ténèbres.