Page:Yver - Les Cousins riches.djvu/48

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En prononçant les mots : nous n’avons pas réussi, Élie Martin d’Oyse, les traits contractés, souffrait tout ce qu’un homme peut endurer quand il est acculé à cette phrase déchirante. La perte d’argent, l’écroulement des espérances pécuniaires, la ruine de ses ambitions, comptaient aussi peu que possible pour cet esprit léger ; mais l’insuccès tenaille les plus secrètes fibres de l’amour-propre humain. C’est le soufflet avec le ricanement de la Destinée ; et pis encore, c’est l’humiliation de ce que l’homme prise le plus en soi-même : la capacité de produire.

Il eut un spasme, une sorte de sanglot sans larmes. Cette fois, Cécile bondit, lui jeta les bras au cou. Il l’enlaça dans la double émotion de son accès de tristesse et de l’appel qu’il subissait près d’elle depuis un quart d’heure. L’orgueil de se savoir posséder cette jeune vie compensait dans cette âme masculine l’échec de son œuvre.

— Puisque tu m’aimes, je ne me plains pas, déclara-t-il tout frémissant.

Mais elle, qui n’avait eu là qu’un geste amoureux et se prêtait à cette passion sans oublier pour si peu le solide raisonnement