Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/149

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Rouen, enchantée de sa belle-fille : toutes deux prétendaient se chérir tendrement. Henriette était redevenue une petite femme très simple, exempte de soucis professionnels, toute au bonheur de conserver ce cher mari qu’elle avait pensé perdre. Le bâtonnier n’avait pas de termes assez vifs pour la louer : elle était admirable d’abnégation, toujours aux côtés de Vélines, le cajolant, le réconfortant. Le jeune homme parfois s’attristait. Cette terrible maladie avait atteint profondément les cordes vocales. Retrouverait-il son organe ? Henriette, inquiète au fond, passait son temps à le rassurer, faisait toutes sortes de projets : on le mènerait aux eaux, à Uriage, il se reposerait ; elle le soignerait si bien !… Et, devant Fabrezan, elle lui faisait hausser le ton pour que le vieux maître jugeât du progrès de sa voix.

« Voilà bien les femmes ! se disait Fabrezan. Celle-là qui me chantait, il n’y a pas deux mois, son enthousiasme juvénile, sa passion de plaider : « Avocate ! Vous ne pouvez pas savoir à quel point je le suis… Ma personnalité de jeune fille, je l’ai conservée intacte. Le mariage ne m’a pas amoindrie… » Allez-vous-en-voir ! Pour une crise d’inquiétude où son amour d’épouse a reçu le vrai coup de la peur, je la retrouve éperdument raccrochée à ce mari dont son orgueil s’était méfié. Littéralement, elle l’a repris à la mort, elle a fait le miracle. De plaidoiries, il n’est plus question ; de personnalité, non plus : le mari l’a