Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/217

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— Des criminels ?… Y a-t-il des criminels ? se demanda tout haut Henriette Vélines, qui donnait, elle aussi, dans les idées modernes, séduite par toutes les tendresses humaines. Pour moi, je pense qu’il y a seulement des malades. On ne châtie pas les malades : on les soigne. Un juge devrait être un médecin.

Mais mademoiselle Angély, avec la clairvoyance de sa sérénité rectifia l’idée :

— Non. Non ! dès lors qu’on admettait les lois et leur nécessité, il fallait des juges qui fussent des juges ! L’avocat ? oui, celui-ci possédait un autre rôle : à lui de distinguer dans le coupable la maladie morale du vice proprement dit ; à lui de prodiguer les soins d’une hygiène spirituelle…

Et tranquillement, avec sa mystérieuse autorité de vieille femme supérieure, elle affirmait l’utilité du châtiment. Elle alla, non sans quelque lyrisme, jusqu’à rappeler la statue géante qui en est l’allégorie et se dresse, terrible, sur la façade du Palais dominant la place Dauphine. Puis, revenant aux juges, entre le sévère Erambourg et deux ou trois jeunes présidents de chambre plus désinvoltes ou ambitieux que charitables, elle cita M. Marcadieu, le père d’Henriette. Dans ce grand Palais où s’essayaient tant d’efforts différents vers l’équité absolue, celui-Là semblait connaître la juste mesure. Il jugeait sans parti pris, avec un admirable souci de la vérité, avec