Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/218

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une dignité si sobre, si discrète, que jamais un journaliste n’avait parlé de lui. Mais le barreau la connaissait si bien, cette attitude parfaite du magistrat, que toutes les avocates présentes, même la fielleuse madame Clémentin, ne purent retenir ce cri laudatif, courant de bouche en bouche :

— Ah ! le président Marcadieu !… si l’on avait toujours affaire à lui !…

Henriette en fut émue aux larmes. Elle souriait, toute épanouie de bonheur. Mais des juges on passait maintenant aux avocats. Les candidatures au bâtonnat commençaient à mettre quelque trouble au sein de l’Ordre. L’ambitieux Lecellier, qui se préparait depuis si longtemps au suprême honneur, paraissait avoir désormais toutes les chances d’être nommé, aux prochaines élections ; et Marie Morvan répétait le mot qui avait fait fortune, le samedi précédent, à la conférence : allusion aux festins fameux où l’illustre candidat cuisinait ses intrigues : « La gastrite de Lecellier sera pour l’année prochaine. »

La petite madame Debreynes ouvrait tout grands ses yeux fins et clignotants :

— Je ne comprends, pas oh ! mais pas du tout !…

Il fallut qu’on lui expliquât le propos. Lecellier, qui n’était pas riche, disait-on, se ruinait à recevoir pour gagner des suffrages. Il était clair qu’une fois bâtonnier il clorait la série de ses