Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/259

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Et il ajoutait avec frénésie :

— Jure-moi, jure-moi que tu m’aimes toujours autant !

Elle l’étreignait, un peu surprise de cette faiblesse où succombait cet homme fort, un peu émue d’en trouver l’aveu sur ces lèvres froides.

— Mais, mon pauvre cher ami, je te l’ai dit cent fois ; si je suis heureuse de réussir, c’est pour la joie que jeté cause. Je ne puis plus te séparer d’aucun événement de mon existence. C’est en toi que je goûte ma petite gloriole, et je t’aime mieux, au contraire, il me semble, depuis que l’exercice de mon métier a amplifié ma vie, l’a faite plus laborieuse, plus féconde : je t’adore avec un cœur dilaté.

Elle lui vit les yeux mouillés de larmes. Cette crise étrange, qu’il se représentait à peine maintenant, aboutissait à un accès de sensibilité. L’àcreté des sentiments qu’il y avait connus, il se la pardonnait pour la franchise dont il croyait faire preuve.

— Oui, oui, je t’ai mal jugée, Henriette ; oublie tout cela. Il n’y avait peut-être là qu’un peu de surmenage cérébral… Je t’aime tant !

Elle le reconquérait de plus en plus, l’éblouissant par le rayonnement de sa jeunesse, l’attirant par cette habitude déjà ancienne qu’elle lui avait donné de son corps. Bientôt ils ne se parlèrent plus, serrés l’un contre l’autre, dans le silence de cette galerie obscure. Ce fut presque religieuse-