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Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/374

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Quand on abolira la loi naturelle qui attribue à celui-ci la force et l’autorité, alors les dames énergiques pourront prendre sa place. Jusque-là, il doit la garder, et ceux que leurs compagnes, en attendant, surpassent aux yeux du monde, on les tourne en dérision, on les méprise, et ils souffrent, Henriette, tu entends, ils souffrent !

Il s’abattait lentement, et un apaisement le gagnait après le terrible accès de tout à l’heure. Son visage, encore tout blanc, avait revêtu le calme ordinaire. Il rappelait, avec ses lèvres rasées, son front haut, la ligne impérieuse du nez et du menton, ces bustes d’empereurs, datant de la décadence latine, qu’on voit au musée des antiques. Il en avait la rigidité, le dédain suprême et la morne contenance.

Ironiquement, celle qu’il avait offensée d’une façon si cruelle prononça :

— Je vois où tu veux en venir. Mes plaidoiries te portent ombrage, ma notoriété te déplaît, mon rôle au Palais est trop large… tu désirerais que je m’évanouisse, que je n’existe plus, que je te cède le pas définitivement…

— Je ne te demande rien, ma pauvre amie : va, poursuis ta carrière !

Henriette se redressa :

— Certes oui, je la poursuivrai, comme c’est mon devoir de dignité, comme le veut ma conscience ; j’irai jusqu’au bout de ma petite mission sociale, et je serai moi-même, sans