Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/431

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Louise soupira longuement. Cette grande fille timide pensait beaucoup et bien. C’était une intelligence profonde et cachée. Elle finit par dire :

— L’homme a perdu là une situation singulièrement avantageuse : il était vraiment le dieu à qui tout revient de droit. Estimez-vous que c’était juste ?

Henriette ne répondit pas. Louise ne pouvait savoir sur quelle plaie vive elle venait de mettre le doigt, ni à quelle crise morale était en proie la célèbre confrère, ni quels examens de conscience, quels retours sur soi-même, on faisait, place Dauphine, depuis qu’André Vélines souffrait de n’être plus aimé. Il montrait cette contention un peu gauche des hommes supérieurs qui s’humilient devant une femme. L’inquiétude éveillée en lui par madame Martinal portait ses fruits. Il était harcelé » par la peur de perdre Henriette, et l’amadouait maladroitement par de petites attentions bénignes, un peu honteuses d’elles-mêmes. Elle, qui s’en apercevait, n’en éprouvait qu’un trouble plus vif : car elle ne voyait plus clair dans son propre cœur, bien qu’elle passât ses journées à s’analyser. Était-il vrai qu’elle se laissât toucher ? Est-ce que le bouquet de violettes attaché à sa jaquette par André, quand ils sortaient ensemble, l’attendrissait ? Est-ce que le compliment très galant qu’il lui adressait sur une plaidoirie la laissait indifférente ? Y avait-il autre chose qu’une froide condescendance dans