Page:Yver - Les Dames du palais.djvu/74

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tion, elle évangélisait véritablement, obtenait des aveux trempés de larmes. Et les municipaux au visage honnête, la jugulaire sous le menton, étaient seuls amoureux de « madame l’avocate ».

Sa ferveur jointe à l’habitude de plaider, lui valut de l’assurance. Son zèle, l’accent de ses plaidoieries la plaçait bien au-dessus de la banalité des jeunes stagiaires. Un jour, elle eut un succès. Un petit garçon qu’elle défendait fut acquitté. Quelqu’un l’attendait à la sortie de l’audience et lui serra la main en la félicitant. C’était André Vélines. Le regard froid du jeune homme exprimait une fierté indicible. Henriette fut très émue.

Et, depuis, elle avait souvent remarqué à ses côtés la présence peut-être fortuite du jeune homme. C’était une assiduité parfaitement discrète. Parfois, quand elle allait écouter Fabrezan, plaidant quelque subtile affaire de succession irrégulière, et qu’elle s’asseyait au banc des avocats, un de ses confrères venait la rejoindre à pas de loup, et, sans l’avoir vu, elle devinait Vélines. Grand admirateur du vieux maître, il s’ingéniait à mettre en valeur aux yeux de la stagiaire la puissance de cette argumentation, signalait d’un sourire les finesses de l’orateur, traitait Henriette un peu en écolière qu’on initie à une science. Et elle ne se fâchait pas, ne trouvait pas cela pédant, se demandait seulement quelquefois s’il n’avait pas un sentiment pour elle. Mais elle