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Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/106

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devant eux un problème d’éducation qu’il s’agissait de résoudre. Ils en causèrent le soir.

— Tu as vu le beau sens moral de cette petite, remarqua d’abord Fontœuvre ; elle a senti quelque chose de suspect dans cette maison, elle n’y veut plus retourner.

— Oui, repartit Jenny, mais je ne peux pas rompre avec cette pauvre amie pour une lubie de Marcelle. D’abord, après toutes les gentillesses de Darche, ce serait de l’ingratitude noire. Elle adore la petite ; je lui causerais là un chagrin affreux. Ce serait méchant, méchant.

— Cependant, reprit Pierre, les aventures de cœur de mademoiselle Darche sont si multiples, si complexes, et elle les étale avec tant de simplicité, que Marcelle peut prendre là une étrange conception de la vie.

— Bah ! Nelly n’est-elle pas libre d’elle-même ? C’est une excellente nature, incapable d’une mauvaise action. Elle ne voit dans l’existence que son art et l’amour : qui pourrait lui jeter la pierre ? Quand Marcelle sera plus grande, je lui parlerai sérieusement, lui montrant quelles sont les qualités de son amie et où sont ses torts.

— Oui, mais comment démontreras-tu ses torts ? Tu blâmeras sa conduite amoureuse ? L’amour est donc un vice hors du mariage, comme dirait ta mère ? Il faut donc passer devant le maire et devant le curé pour rendre honorables le même sentiment, les mêmes actes qui