Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/128

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avait été pour lui une révélation le premier jour où il était venu ici. Sa femme alla le rejoindre. Nicolas murmura quelque chose, mais si bas, si indistinctement, que Marcelle, qui était tout oreilles, n’en put rien saisir. Maintenant ils étaient debout l’un devant l’autre, les yeux dans les yeux, sans que leurs lèvres fissent un mouvement. Les yeux si purs, si beaux de Jeanne, remplis d’adoration, se levaient vers ceux de Nicolas qui étaient à demi clos dans un sourire de protection, de confiance. Nul mot de passion, nul cri n’aurait exprimé l’étonnante puissance de l’amour autant que ce regard par lequel ces deux êtres se versaient l’un dans l’autre, sans réticence, sans arrière-pensée, sans que leur moi gardât rien de lui-même.

Et il y eut dans ce regard une telle force, que là-bas, la petite Marcelle, qui épiait curieusement un indice d’amour, en reçut un choc, un éblouissement. Ses paupières battirent ; elle se retourna contre le mur. Et il lui semblait que tout changeait autour d’elle, qu’elle avait pénétré dans un autre monde, dans une région mystérieuse, jusqu’ici demeurée inaccessible pour elle. Et elle se disait avec une sorte de fièvre.

« J’ai vu l’amour ! J’ai vu l’amour ! »

Elle ne savait plus où elle était. Quand sa mère arriva, quelques minutes plus tard, et qu’elle eut emmené les cousins dans la salle à manger pour leur montrer un pâté que Brigitte avait confec-