Page:Yver - Les Sables mouvants.djvu/133

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livres favoris. Aux murs, des photographies choisies reproduisaient les « chers chefs-d’œuvre » de la maîtresse du logis. C’est là que la famille Fontœuvre, arrivée dès cinq heures, s’était installée en compagnie d’Houchemagne. Et il y avait près de la cheminée, où l’on avait fait flamber quelques brassées de bois, un grand bonhomme voûté, au visage large, hâlé, ridé, fripé, rasé, qu’éclairaient deux yeux bridés et spirituels. Ses larges épaules tendaient un gros paletot de drap brun, et il étalait sur ses genoux deux mains noueuses et calleuses. C’était le père de Nicolas.

À l’entrée de toute cette société, il se leva sans embarras, en vieux vigneron cossu qui, sans être riche, a toujours été le maître de sa terre. Et, tout en distribuant aux gens à qui Nicolas le nommait, de silencieuses poignées de main, il regardait son fils, son point d’appui, sa fierté, sa gloire. Il valait bien quelque chose auprès de tous ces beaux messieurs, puisque c’était lui qui avait fait ce gaillard qui les surpassait tous.

Comme son mari était maintenant entouré par la bande qui ne tarissait pas sur les charmes de cette maison de poète, Jeanne, affectueusement, vint s’asseoir près de son beau-père pour lui donner des explications sur les invités. Madame Trousseline l’observait, l’écoutait. Qu’elle était bonne et gracieuse pour ce vieillard rustique ! De temps à autre elle posait sa main fuselée sur la grosse patte velue du vigneron.